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Campagne du Soldat Martial VARDEME

107ème Régiment d'Artillerie Lourde.




Martial VARDEME est appelé à l'activité le 8 octobre 1905. Il arrive le jour même au 2éme Régiment d'Artillerie à Grenoble caserne De Bonne comme 2ème canonnier conducteur.

Il est libéré le 18 juin 1906, un certificat de bonne conduite lui étant accordé.


Il fait deux période, la première au sein du 21ème Régiment d'Artillerie du 23 novembre au 20 décembre 1908, la seconde du 3 au 19 mars 1913.


Il est mobilisé le 1er août 1914 et arrive au 52ème RA le 7 août 1914.


Aussitôt débarquement en Argonne et le bivouac. Les officiers savent où ils sont, les hommes l'ignorent. Le lendemain, commencent des marches d'approche. Interminables colonnes de corps d'armée où l'allure de marche est celle de l'infanterie. Près de Mouzay, pendant un abreuvoir, le bruit court que des avant-gardes ennemies sont à Stenay, immédiatement les chevaux sont attelés et les marmites culbutées, on se hâte vers Stenay qu'on atteint et traverse dans le plus grand calme. Pas la moindre trace d'ennemis dans le pays. Plusieurs jours de repos à Cervisy et Martincourt.



La Belgique et la retraite.


Le 22 août 1914, entrée en Belgique. Après avoir traversé Florenville, on se dirige vers le nord, traversant la forêt d'Herbeumont. Le canon tonne plus fort et, à la sortie des bois, on aperçoit quelques cadavres de chevaux. La colonne est survolée par plusieurs avions ennemis volant à faible hauteur. Les pièces sont mises en batterie le soir même, mais on ne tire pas et, pour la nuit, un cantonnement-bivouac est organisé.

Le 23, mise en batterie dans la région de Straimont; il y a du brouillard, L'attente est de courte durée, bientôt, les groupes sont pris sous le feu ennemi heureusement mal réglé. Ce sont les premiers obus que l'on reçoit, et le tir semble impressionnant. On n'a pas l'occasion de tirer. L'ordre de se replier arrive : toute l'artillerie du corps d'armée doit franchir un unique passage à niveau et faire quelques centaines de mètres sur une route vue de l'ennemi. Les artilleurs allemands n'allongent pas leur tir, c'est sans perle qu'on se tire de cette première affaire.

La grande forêt est de nouveau traversée. A la sortie de Florenville, nouvelle mise en Batterie avec mission de tirer sur l'ennemi qui déboucherait de la forêt d'Herbeumont, tout le régiment est au complet. Nouveau repli dans l'après-midi, la frontière est retraversée : notre séjour en Belgique a été d'une trentaine d'heures et nous n'avons pas tiré un coup de canon.



Blagny.


La nuit est passée au bivouac près de Deux-Villes. Dès le petit jour, des reconnaissances sont exécutées et les groupes prennent position sur les hauteurs qui dominent Blagny et Charbeaux.

Pour la première fois les batteries ouvrent le feu sur l'ennemi et battent des colonnes signalées par la poussière qu'elles soulèvent. Vers 9 heures, l'artillerie ennemie qui a pris position arrose copieusement les pentes sur lesquelles nous nous trouvons. Le tir commence par des fusants. Les coups proviennent des bois de Pure, bois de Matton, bois du Banel et de Messincourt. Au début de l'après-midi, le tir ennemi devient plus précis.

Pour enrayer l'avance allemande, les groupes viennent de faire une très grosse consommation de munitions, ils réussissent en partie à arrêter l'ennemi, mais sur un point, au mont Tilleul, des éléments adverses ont pu progresser et menacent la crête où il y a du matériel.

La Chiers est traversée pendant la nuit. Quelques mises en batterie rapides sur route, quelques salves dans la nuit, puis la marche est reprise vers l'arrière.

Le 25, les groupes se reconstituent, ils occupent plusieurs positions autour de Vaux, Malandin, Mouzon, tirent sur les routes et points de rassemblement probables de la rive droite, puis franchissent, la nuit, la Meuse à Mouzon et bivouaquent au moulin du Grésil et au moulin de la Hamelle.



Yoncq la Meuse - Beaumont.


Le 26, c'est la Meuse qu'il faut défendre. Le régiment occupe des positions près de Yoncq, il tire activement, mais ne peut empêcher l'ennemi de franchir le fleuve au cours de la nuit qu'on passe sous la pluie. Le 27, des positions sont prises près de eaumont.



Flaba - La Besace.


Le 28 au matin, le régiment monte s'installer sur les hauteurs de Flaba où se trouve déjà une nombreuse artillerie. Le début du combat est heureux pour nous, mais lors d'un changement de position les batteries sont prises sous le feu, les fusants éclatent au-dessus des têtes, il n'y a heureusement pas de blessés.

Une position est occupée au sud de la Besace; elle doit être évacuée après quelques tirs, les pièces étant prises sous le feu de l'infanterie ennemie qui a pu progresser en s'infiltrant dans les champs. On tire jusqu'au dernier moment, alors que les avant-trains sont déjà presque accrochés.

Ensuite, triste retraite; une colonne hétéroclite et bizarre fait l'ascension de la côte de Stonne, des sections de munitions et des batteries sont enchevêtrées, des fantassins s'accrochent aux voitures pour se reposer, des charrettes de toute nature s'intercalent dans la colonne. Le mouvement s'exécute bien, car l'ennemi ne tire pas. De nombreux blessés sont étendus sur les talus qui bordent la route à l'entrée de Stonne.

Dans la nuit, le bivouac est organisé à Châtillon-sur-Bar, Verrières, Authe. Le 29, l'artillerie de corps, groupée à Châtillon-sur-Bar, détache deux groupes qui s'installent à deux kilomètres nord ouest de Brieulles-sur-Bar et restent toute la journée en surveillance sur la route de Stonne aux Grandes-Armoises. Le feu n'est pas ouvert. Les deux groupes libres se dirigent sur Vouziers dans la journée, les autres les rejoignent le soir et tout le régiment s'installe au quartier de cavalerie. Chevaux et personnel, installés dans les écuries, le manège et les chambres, prennent un repos bien gagné. C'est la première fois depuis que l'on bat en retraite que tout le monde est abrité pour la nuit.

Le 30 dans l'après-midi, alerte : les deux premiers groupes se portent au bivouac au nord de Vouziers, les deux derniers en font autant vers Ballay.



Vonq les Alleux.


La nuit est moins calme. Les 3ème et 4ème groupes montent prendre position près du village des Alleux ; les 1er et 26 groupes ne se mettent en route qu'au jour : ils traversent l'Aisne et vont s'installer au sud-est de Voncq, dans un terrain accidenté, au milieu des pommiers.

Cette journée du 31 est dure pour le régiment, de très nombreux tirs sont exécutés au sud du Chesne et dans la région des Petites-Armoises. Le 46 groupe est repéré par des avions ennemis et pris à partie par des obusiers, il subit de grosses pertes, amène les avant-trains et quitte la position sous un feu violent parfaitement réglé. Le nom des Alleux restera gravé dans la mémoire de ceux qui ont participé au combat. Le soir, rassemblement des quatre groupes au bivouac entre Vandy et Terron-sur-Aisne.



Marches de retraite.


De bonne heure, le signal du départ est donné, c'est encore vers l'arrière qu'on se dirige. Vouziers est traversé de nouveau, la ville sera abandonnée sans combat. Les services de l'armée déménagent également. La ville est vite passée et, par une chaleur terrible, le régiment s'engage sur la grand'route, traverse Monthois sans s'y arrêter et, mélangé aux populations qui fuient, arrive à Séchault où on forme le parc dans un grand verger.

Le repos n'est que de courte durée, le soir même il faut partir. Dans l'obscurité, la retraite se continue, on circule dans des chemins passablement mauvais et, vers minuit, on bivouaque à Tahure.



Souain.


Le 2 septembre, tout le régiment prend position au nord de Souain. Ses objectifs sont : Somme-Py et Sainte-Marie-à-Py. Les batteries exécutent sur ces lisières un tir jusqu'à épuisement de leurs coffres, vrai feu roulant, mais le résultat cherché est obtenu : on aperçoit des Allemands en débandade se sauver sur les hauteurs au nord de la ville. Dans leur retraite précipitée, les fantassins allemands ont pris des gerbes de blé ou d'avoine et les mettent sur leur dos pour se protéger.

Le 2ème groupe, qui s'est installé dans les clairières de petits bois de sapins, est pas mal arrosé par l'artillerie ennemie, il subit quelques pertes.

L'ordre de retraite arrive comme tous les soirs. A l'arrivée à Suippe, où l'on bivouaque. La nuit se passe à peu près tranquille, mais de bonne heure le réveil est sonné par les premiers obus ennemis qui éclatent sur la ville. Une nouvelle fois, le régiment se remet en marche vers l'arrière. Les 1er et 2ème groupes s'arrêtent une partie de la journée à Courtisols et, vers le soir, s'en vont bivouaquer à Saint-Amand-sur-Fion.

Le 3ème groupe prend part à un combat dans la région de Saint-Hilaire-au-Temple, puis traverse Courtisols et rejoint les deux premiers à Saint-Amand-sur-Fion.

Le repos ne dure guère. A 22 heures l'ordre de départ est donné, tout le monde est épuisé : les conducteurs dorment sur leurs chevaux, eux-mêmes assoupis et qui marchent à allure rapide, les servants ronflent sur les avant-trains, de malheureux fantassins, n'en pouvant plus, somnolent accrochés aux voitures ou en équilibre sur les tubes des canons. On traverse Vitry-le-François vers le milieu de la nuit, c'est lugubre. La ville est déserte et le roulement du matériel sur le pavé se répercute dans le lointain.

Quelques heures de repos à Frignicoûrt, et en route à nouveau. Le régiment est dépassé par qs colonnes de cuirassiers, très éprouvés par les récents combats.

On arrive à Margerie-Hancourt où tout le monde bivouaque, les trois groupes sont réunis. Le 4ème groupe fait bande à part, il vient bivouaquer à Pogny, puis combat au « Signal des Mouettes » (nord-est de la Chaussée-sur-Marne), où il reste en position jusqu'à la nuit bien que ses voisins se soient retirés sous la menace de la cavalerie ennemie.

Une de ses batteries occupe une position abandonnée par un autre groupe. Ce groupe fait une marche à travers le camp pour être prêt à intervenir sur son flanc gauche menacé et vient prendre position à Saint-Hilaire-au-Temple, il tire sur des colonnes ennemies signalées et est pris à partie par l'artillerie allemande. Bien que menacé par la cavalerie ennemie signalée dans les environs, il reste sur la position et tire jusqu'à 22 heures. A cette heure il quitte la place, ayant eu quelques tués et rejoint la colonne sur la route de Châlons.

Le 5, il est à Saint-Louvent, près de Châtel-Raould. Il met en batterie le premier, exécute des tirs sur la gare de Vitry-le-François. Prenant à partie des batteries ennemies vues en action, il exécute sur elles un tir progressif à obus à balles au moment où elles amènent les avant-trains et leur fait subir de fortes pertes.

C'est le début de la bataille de la Marne dans cette région du champ de bataille.

Après une nuit calme, tout le monde profite de la liberté. On a de l'eau à discrétion, ce qui permet le luxe d'une toilette en règle

La Marne.


Le 5, après-midi, les 1er et 3ème groupes quittent le bivouac, le 26 reste seul à Margerie- Hancourt.

1er groupe.

Le 1er groupe se dirige vers les Arzillières et, le soir même, prend position à l'ouest de Châtel-Raould, au sud de la cote 474, avec Huiron comme principal objectif. L'ennemi bombarde copieusement les positions et occasionne de lourdes pertes, la situation est plusieurs fois critique. Bien que très éprouvées, les batteries restent en place plusieurs jours sous le feu, tirant sans arrêt.

Le 8 septembre, la 1ère batterie se trouve derrière une crête voisine de Châtel-Raould. L'ennemi déclenche une brusque attaque pour s'emparer de la crête et, de suite, gagne du terrain, arrivant à moins de 500 mètres des batteries. L'infanterie allemande, qui est maintenant à moins de 400 mètres, s'arrête, hésite, puis reflue en désordre, la position est sauvée.

Les jours suivants, le groupe continue à subir des pertes, sa cavalerie est très éprouvée. Le 11, le groupe cantonne à Blacy.

2ème groupe.

Le 2e groupe quitte Margerie-Hancourt le 6 au matin. Le 7 il met en batterie du côté de la ferme du Tillat, sur une crête que l'infanterie évacue par suite du bombardement ennemi. Dans la matinée, une attaque ennemie, repoussant notre brave infanterie, s'approche un peu trop du groupe qui arrive pourtant à briser cette offensive. Obligé de changer de position, il doit passer la nuit au bivouac dans les bois.

Le 8, installation des batteries non loin de Meix-Tiercelin, les reconnaissances préalables montrent que les positions imposées sont déjà occupées, il faut s'installer un peu en arrière. De nombreux tirs sont exécutés, les officiers qui sont à l'observatoire voient avec peine des colonnes ennemies circuler en formation serrée sur la route Sompuis-Soude- Sainte-Croix, on ne dispose hélas d'aucune pièce à longue portée et il est imposible de semer un peu de désordre dans tout ce rassemblement de voitures : il est hors de portée.

Le soir, on trouve naturel d'aller au cantonnement à Domprot. Les positions sont reprises avant le jour. Les batteries ne sont pas éprouvées, mais les environs sont battus.

Le 9, après-midi, un premier bond permet de prendre position à la sortie nord de Meix-Tiercelin. Pourtant la traversée du village s'effectue sans mal. Au moment de la mise en batterie, une rafale de gros calibre tombe près des attelages, causant quelques victimes.

La nuit, le groupe cantonne à Meix-Tiercelin et, le 10, marche de l'avant. Quel curieux spectacle que celui du champ de bataille, tout chaud encore des mêlées qui viennent d'avoir lieu.

Sompuis, l'objectif du groupe, est traversé avec une vive satisfaction, des sacs qui n'ont pu être chargés sont sur les trottoirs, des vitrines brisées encombrent la route. Les tirs ont, hélas, mis à mal un grand nombre de maisons. A la sortie de Sompuis, on trouve une position de batterie ennemie sur laquelle des tirs ont été exécutés les jours précédents, les tirs ont été bons, ainsi qu'en témoignent les restes de matériel brisé et démoli.

3ème groupe.

Le 3e groupe, quitte Margerie en même temps que le 1er, dans l'après-midi du 5, il se dirige vers le village des Rivières qu'il traverse sous le feu de l'ennemi. Le soir même, il se met en batterie près de Châtel-Raould.

Le 6, il est fortement bombardé après avoir été repéré et signalé par des avions ennemis, malgré tout, il ne cesse de tirer et de se ravitailler en munitions. Quelques pertes à enregistrer. Le 7, même bombardement. Le 8, au point du jour, les balles claquent contre les boucliers et crépitent autour des pièces, pas de doute, l'ennemi a progressé. En effet, se glissant à la faveur de la nuit, il a pu s'approcher des batteries et le gros de ses troupes se trouve à l'abri, en angle mort, protégé par la crête. Toute la journée les batteries sont soumises à un tir de démolition précis et réglé, observé par les drachens qu'on aperçoit en l'air.

Vers la fin de l'après-midi, l'infanterie ennemie arrive sur la crête à 200 mètres du groupe, ne pouvant plus tirer, les servants s'emparent de leurs mousquetons, prêts à défendre leur matériel jusqu'à la mort. Par bonheur, l'attaque ennemie est vue d'un observatoire du 1er groupe : une des batteries de ce groupe ouvre immédiatement le feu, sème le désordre et l'épouvante dans les rangs de l'adversaire, lui cause de grandes pertes et l'oblige à reculer. En fin de journée, la 7ème batterie n'a plus qu'un seul canon, ses caissons sont presque tous détruits et, comme personnel, il ne reste que trois servants.

Le 9, journée terrible, le tir parfaitement réglé de l'ennemi augmente d'intensité, c'est un enfer. Pendant ces quatre journées, les actes d'héroïsme se succèdent. Le 20, le groupe n'a plus qu'une seule pièce en état de tirer, chacune de ses batteries a perdu en tués et blessés une moyenne de 22 à 24 hommes.

Le 21, marche en avant, les restes du groupe cantonnent à Blacy avec le 1er groupe.

4ème groupe.

Le 4e groupe, qui a battu en retraite moins loin que ses camarades, est en position, le 5 septembre, à l'est de Châtel-Raouid. Le 6, il y est fortement pris à partie par l'artillerie ennemie. Le 8, le groupe reçoit l'ordre de s'installer au nord-ouest de la ferme des Mandres. A la fin de la journée, quelques pertes sont malheureusement à enregistrer.

Le 10, le groupe se porte près de Saint-Louvent. Le 11, le commandant de groupe et l'officier orienteur partis en reconnaissance signalent qu'ils ne trouvent plus l'ennemi, le groupe se porte en avant, traversant le champ de bataille où gisent les héros de si durs combats. Les pertes des artilleurs sont sévères, mais au fur et à mesure que les batteries avancent chacun peut voir que le sacrifice des camarades n'a pas été vain : les tirs ont fait du beau et bon travail, les cadavres des feldgrauen sont là pour en témoigner et l'ennemi recule.

Dans un chemin creux de 300 à 400 mètres de long, occupé par l'infanterie ennemie, les rafales de 75 ont passé : il ne manque pas un fantassin allemand, tous sont là restés à leur poste, tués ou blessés. La ferme du Cul-de-Sac qui est à proximité est pleine de blessés (200 environ). Dans le village on découvre quelques ennemis complètement ivres, les caves ont été pillées et le Champagne a dû couler à flots, les nombreuses bouteilles qui jonchent le sol prouvent que l'ennemi a largement profité de la situation.


Les 1er, 3ème et 4ème groupes sont réunis, passablement désorganisés. Chacun sait que devant lui l'Allemand a été forcé de reculer, mais il ignore à peu près tout ce qui s'est passé ailleurs, le grand succès de Fère-Champenoise et des marais de Saint-Gond est connu, mais imparfaitement.

Pendant ces derniers jours, le 3ème groupe, qui est isolé, traverse la Marne, bivouaque le 11 à Saint-Amand-sur-Fion et Coulvagny. Le 12, à travers les bois, il se dirige vers Somme-Yèvre, les 1er, 20 et 40 groupes, quittant Blacy, font route pour le même cantonnement, le 4ème groupe, en tête, a pour mission de protéger la rive gauche de la Marne à 4 heures. A plusieurs reprises, le spectacle du champ de bataille se présente dans toute son horreur : cadavres d'hommes, de chevaux, fusils brisés, effets d'équipement et d'habillement déchiquetés, sacs éventrés, etc.

Dans la soirée, tout le régiment est réuni au bivouac, à Somme-Yèvre. Le 13, bivouac à Saint-Mard-sur-Auve, village détruit. Sur la route, on croise ou dépasse de nombreux convois de prisonniers. Les chevaux sont dans un état lamentable, maigres, harassés plus ou moins couverts de boue, ils tirent péniblement.

Le 14, le régiment commence des marches dans la région de Champagne. Le régiment est en réserve d'armée; on le promène à droite et à gauche, Laval-sur-Tourbe, Somme-Tourbe, pays qu'on traverse bien souvent. Le bivouac est établi près de Laval-sur-Tourbe, dans un marécage. Les voitures ont leurs coffres à peu près vides, les munitions manquent et, malgré leur charge réduite, il faut souvent des attelages de renfort pour les sortir de certains bourbiers.

Le 17 septembre, sous une pluie torrentielle, le régiment se met en marche pour appuyer une attaque près de Hurlus, où l'ennemi se serait retranché. La marche est très pénible, les voitures s'embourbent à chaque instant, les chevaux tombent, les groupes arrivent très tard, au milieu de l'obscurité la plus complète. Les batteries ne peuvent participer à l'action, la pluie tombe à torrents.

Au jour, nouveau départ vers l'arrière. Défilé encore plus lamentable que la veille; les chevaux tombent pour ne plus se relever. Cette expédition d'une nuit, sans mise en batterie, n'a comme résultat que la perte pour chaque groupe d'une quarantaine de chevaux. Malgré les difficultés de la route et la fatigue générale, le régiment arrive à Suippes où il bivouaque (ferme de Piémont).

Les 18 et 20, les groupes mettent en batterie dans le camp de Châlons (région des Ouvrages-Blancs).



Champagne (septembre 1914 mars 1915).


Les 1er et 2ème groupes s'installent au voisinage de Saint-Hilaire-le-Grand, les 3ème et 4ème au sud et sud-ouest d'Auberive. Les coffres sont à peu près vides; ordre est donné d'économiser les munitions. L'ennemi paraissant ne plus bouger, des abris sont construits autour du matériel : huttes de paille, trous couverts avec les matériaux de démolition trouvés dans les villages. Quelques lignes téléphoniques à demeure sont installées.

Quelques alertes, la nuit, auxquelles on ne peut répondre, n'ayant pas de munitions. Les fantassins ont des tranchées encore peu profondes, peu ou pas de boyaux pour les relier entre elles. Les premières pièces lourdes (155 court) sont amenées dans le secteur de Jonchery. Le lendemain, l'ennemi prononçant une attaque de nuit subit de lourdes pertes du fait des batteries de campagne et du tir de l'artillerie lourde.

A la fin de septembre, le 3ème groupe prend position au nord-est de Baconnes. Au milieu d'octobre, les 1er et 2ème groupes quittent Jonchery-sur-Suippes et vont relever des batteries installées près de Prosne et au nord de Baconnes.

En novembre, une attaque est montée pour s'emparer d'un saillant ennemi devant Jonchery : c'est l'attaque du bois B. Pour cette opération, quatre pièces de 75 doivent être amenées à 400 mètres des premières lignes pour exécuter des brèches dans le réseau allemand. Le matin de l'attaque, on essaie de déboucher les créneaux qui masquent les embrasures, deux se retirent très facilement, mais deux autres, collés par la gelée, font corps avec les casemates. Les chefs de pièce et servants n'hésitent pas : bondissant hors de la tranchée, ils s'arment d'une pioche et, malgré le tir de mousqueterie violent dirigé sur eux, parviennent à retirer les panneaux. Le hasard veut qu'aucun de ces braves ne soit blessé.

La nuit venue, la manœuvre inverse de celle de la veille est exécutée : les pièces sont ramenées aux batteries au prix des mêmes difficultés, mais avec le même succès.

Le 24 décembre, l'attaque recommence, mais avec un peu plus d'ampleur que la dernière fois. Les brèches sont faites par les batteries placées à environ 1.200 mètres des lignes. Tout a été préparé d'avance : emplacements, liaisons téléphoniques. Le passage sur la Ain est difficile : il n'existe qu'un petit ponceau à demi défoncé pour franchir le ruisseau. L'obstacle est pourtant franchi, mais il reste 300 à 400 mètres à faire dans un terrain marécageux et quinze hommes ont peine à amener une pièce en position.

En dehors de ces attaques, les groupes n'exécutent que quelques tirs peu importants. A plusieurs reprises, les 3ème et 4ème groupes déclenchent une espèce de tir inventé depuis peu : le « tir d'épouvante », qui consiste à faire tirer à vitesse maxima le plus grand nombre de pièces pendant deux à trois minutes, tirs dirigés sur des organisations importantes et sensibles de l'ennemi. Ce tir fut par la suite suivi à cinq minutes d'intervalle d'un deuxième tir analogue, pour détruire le personnel qui aurait occupé les tranchées par peur d'une attaque.

De janvier à mars, l'ennemi améliore ses tirs de contre-batterie; les groupes sont quelquefois violemment pris à partie par l'artillerie ennemie.

Pendant ces trois mois, on a malheureusement à noter la crise des éclatements de pièces. En janvier, la 6ème batterie, pour la première fois au régiment, a un canon qui saute, tuant le chef de pièce et deux servants.

Le 24 mars, le régiment quitte ses positions et cantonne à Cuperly. Le 25, cantonnement à la Chaussée-sur-Marne, et le lendemain embarquement à Vitry-la-Ville, c'est le premier embarquement depuis celui de la mobilisation. Le régiment débarque à Toul les 26 et 27 mars.



Lorraine (mars à juin 1916).


Après le débarquement à Toul, l'étape se fait par une nuit glaciale.

A peine installés, les groupes participent aux attaques de Regnéville-en-Haye et de Fey-en-Haye, attaques couronnées de succès en même temps que d'autres dans le bois Le Prêtre. Le ler avril, le 3ème groupe vient s'installer près de l'auberge Saint-Pierre. Le 3sup>ème groupe est au voisinage de la forêt de Puvenelle et en profite. Le temps est mauvais pour l'installation : pluie continuelle et terrain détrempé. L'attaque contre Remenauville échoue.

Au début d'avril, on continue l'opération qui a pour but de réduire la hernie de Saint-Mihiel, l'attaque doit se faire à l'ouest du côté des Eparges. L'offensive a lieu le jour de Pâques.

Après ces quelques jours d'excitation, période de calme. Au milieu de mai, le 2ème groupe quitte le ravin de Limey pour aller occuper des positions au sud de la route de Metz, au nord de Mamey, au milieu d'un bled sinistre, ses abris sont des trousassez innommables.

Le 3ème groupe, installé dans le bled, a construit de solides positions et des casemates, très visible au milieu du terrain uni, il n'est pourtant pas bombardé, il est probable que l'ennemi se figure, en voyant ces batteries si apparentes, que ce sont de fausses positions.

Le 4ème groupe, lui, est bombardé, la ferme du Puits, où est l'élat-major du groupe, est régulièrement prise sous le feu et les batteries sont fréquemment marmitées.

Le 1er juin, les 3ème et 4ème groupes sont séparés des 1er et 2ème pour former l'artillerie de la 128ème division.



Martial VADERME passe au 4ème Régiment d'Artillerie Lourde le 1er juin 1915.



Le 7 juin 1915, le 4ème groupe entre en action dans les environs du fort de Saint-Michel à Verdun (le jour même de la reprise du fort de Vaux). Le 18 juin, le 2ème groupe est appelé à relever un groupe du 85ème R. A. L., sur la rive gauche de la Meuse, sur les pentes que couronne le fort de Marre. Le régiment entre alors dans la fournaise.

Ce fut la première bataille de Verdun pour l'artillerie. La grande attaque se produisit le 23 juin. L'ordre était donné aux armées allemandes d'entrer coûte que coûte dans la ville. Les groupes subissent des bombardements par obus asphyxiants, les batteries tirent quand même sous le masque malgré la chaleur torride, et l'infanterie allemande arrive à moins de 1.500 mètres des pièces du 5ème groupe.

Le 4ème groupe, pendant ce temps, contrebat efficacement une ligne de batteries de 105 qui gêne les contre-attaques de notre infanterie. Les résultats qu'il obtient sont probants.

Le 11 juillet, restaient seuls à Verdun les 2ème et 4ème groupes. L'ennemi attaque à cette date, il est repoussé. Les positions de batteries deviennent des objectifs réguliers des tirs de concentration ennemis.

Du mois d'août au mois de janvier 1917, lés groupes préparent puis prennent part aux contre-offensives des 2 et 4 octobre et 15 décembre 1916.



Martial VADERME passe au 107ème Régiment d'Artillerie Lourde le 1er novembre 1915.



Le 107ème régiment d'artillerie lourde a été créé le 1er octobre 1915. En dehors des unités formant le dépôt, il comprenait peu après huit groupes dont le 2ème constitué des éléments du 4ème R.A.L.

Le groupe est placé en réserve de la 5ème armée, s'installe au cantonnement de Grugny jusqu'au 1er juin 1916. Pendant cette période il continue son entraînement, prenant part à de nombreuses manoeuvres avec les grandes unités en réserve. Par groupe constitué ou par batterie isolée, il est fréquemmment engagé dans les secteurs de différents corps d'armée, pour coopérer à des actions locales ou en prévision d'attaques ennemies. Au printemps de 1916, ces engagements deviennent de plus en plus fréquents à mesure que grandit la menace de Verdun.






Martial VADERME est mort le 8 mars 1916 au fort de Vaux (Meuse).

Soldat modèle, blessé légèrement le 27 février 1916, a continué son service jusqu'au 8 mars 1916 jour où il est tombé, mortellement frappé en accomplissant son devoir.

Il est cité à l'ordre de l'Artillerie.